Les charrois militaires, 1789-1800

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Historique :

 Au début de la Révolution et jusqu’à la naissance des bataillons du train des équipages et de l’artillerie en 1800, les charrois de l’artillerie étaient assurés par des hommes qui n’étaient pas spécifiquement des militaires. Les charretiers étaient des hommes réquisitionnés ou soldés, parfois dans le sein de compagnies privées (agence des charrois) et qui suivirent donc le destin des armées républicaines et de son artillerie.

Leur réputation était exécrable dans l’armée, par leur propension en cas de danger de filer à l’anglaise, couper les traits et s’enfuir à bride abattue avec les chevaux, laissant dans leur panique canons, caissons et chariots sur place, à la merci de l’ennemi.

N’ayant pas de statut dans l’armée, cette situation perdura cependant longuement du début de la Révolution jusqu’en 1800. Il est intéressant de noter que la décision fut prise sous le Consulat, le Premier Consul, Napoléon Bonaparte étant comme tout un chacun le sait, un artilleur et même un très bon artilleur.

 

Documents :

 

« Liste des citoyens proposés à la Convention Nationale par le Comité de Surveillance des subsistances, habillements et charrois militaires pour remplir les places d’inspecteurs-généraux des charrois de l’Armée et de l’Artillerie »[1] :


  • Jean-Baptiste Roux, de Lunel département l’Hérault, père de 15 enfants et inspecteur des charrois.

 

  • Mathieu Vaudessel, négociant rue neuve Saint-Marc n° 8, section Le Pelletier à Paris, père d’un enfant en bas âge, il a passé à la censure du Comité révolutionnaire de la section qui déclare qu’il s’est toujours conduit depuis qu’il est dans l’arrondissement en bon patriote et vrai républicain, qu’il est reconnu pour un bon sans-culotte dans les bons principes tant par son assiduité aux assemblées que par son exactitude à son service militaire.

 

  • Cassier, du département de la Marne, commissaire à l’acceptation de la Constitution.

 

  • Lesaint, habitant rue Traversière Saint-Honoré à Paris, élu Capitaine dans le bataillon de la Section de la Montagne, 9ème compagnie, depuis que cette section s’est régénérée. Il est marié, sans enfants, âgé de 42 ans. Il étoit dans l’affaire du 10 août (prise du château des Tuileries) et y a même reçu une contusion. Son patriotisme prononcé n’a pas cessé depuis 1789.

 

  • Abrau fils, de Paris, conducteur dans les charrois, actuellement à l’armée d’Italie, il est marié et il a deux enfants, il a été commandant de la Garde nationale dans le département de la Meurthe.

 

  • Bergerat, de Paris, rue Cadet, faubourg Montmartre, n° 4, ci-devant maître d’équitation il a été inspecteur des charrois de la compagnie Masson pendant trois mois. Il a formé le dépôt des charrois des armées à Beauvais, il est marié et il a trois enfants.

 

  • Thomas Renard, de Saint-Florentin, département de l’Yonne, homme de loi, administrateur du Conseil Général du département de l’Yonne, âgé d’environ 30 ans, marié sans enfant. Il a fait une campagne à ses frais comme volontaire à cheval en 1791, il est membre d’une société populaire.

 

  • Jean-François Jeunesse, de Chaumont, département de la Haute-Marne, conducteur dans les messageries, ci-devant marchant marié et âgé de 44 ans.

 

  • Joseph-Adrien Atrux, de Paris, section de Mutius-Scévola, âgé de 38 ans, marié et père de quatre enfants. Employé depuis 1789 dans les bureaux, il a fait la campagne de Corse et d’Italie et il jouit de l’estime de tous les canonniers, ses camarades, il demeure rue dit Vieux-Colombier n° 772.

 

  • Labenerre, ci-devant orateur du peuple, à présent commis principal du bureau des cotes, 3ème division du département de la guerre.

 

  • Desbrest, capitaine-commandant de la gendarmerie à Montluçon, district du même lieu, département de l’Allier, âgé de 46 ans, célibataire, bon patriote, et fils d’un marchand épicier. Il a servi pendant 28 ans dans le corps de la Gendarmerie, puis des fourrages de laquelle il a été chargé seul pendant 5 ou 6 ans à Lunéville.

 

  • Jean-Baptiste Guichardet, âgé de 43 ans, marié, père de 4 enfants, ci-devant maire d’Ancy-le-Franc, chef-lieu de Canton, district de Tonnerre, département de l’Yonne. Membre du Comité de Surveillance de son canton, et commissaire à l’acceptation de la Constitution.

 

  • Jean-François Berthelot, âgé de 41 ans, natif de Rennes, département de l’Ille-et-Vilaine, ancien contrôleur dans les fermes de Bretagne, ensuite négociant et armateur à Lorient, nommé garde-magasin à l’Isle de France, place dont il n’a pu jouir, parce qu’il étoit trop patriote, et qu’il avoit propagé en cette colonie les principes de notre Révolution, depuis nommé sous-directeur des hôpitaux de Perpignan avec 1 800 livres d’appointements qui ne pouvoient lui suffire pour vivre avec une femme et cinq enfants, parce qu’il étoit honnête homme, raison qui l’a décidé à quitter cette place. Il est membre des Sociétés populaires de Paris, de Perpignan, d’Avignon et de Nantes, il a servi constamment dans la Garde nationale depuis la Révolution, tant en France que dans l’Inde. Il a des connoissances particulières en subsistances, fourrages et chevaux, connoissances qu’il a acquises dans les différents commerces qu’il a faits, Berthelot réside au Bourg de l’Egalité, ci-devant la Reine.

 

  • Pierre-Charles Régnier, de Seyne, dans les Basses-Alpes, ci-devant visiteur des patentes dans le district de Digne, père de deux enfants, âgé de 46 ans. Il a été contrôleur de la marque des cuirs, et en même temps, préposé des entrepreneurs de la voiture et des sels de Marseille, et depuis le commencement de la Révolution, il a donné des preuves constantes de patriotisme.

 

  • Dufour, de Paris, rue Saint-Sauveur, n° 31, il a été employé dans les fermes pendant 12 ans, il est âgé de 30 ans et père de quatre enfants. Il a servi cinq ans dans les troupes de ligne, et a cinq frères au service de la République.

 

  • Josse, père de famille, président de la société populaire de Jussienne. Il a servi 16 ans dans les armées.

 

  • Charles Pasquier, maréchal-ferrant et expert, âgé de 46 ans, demeurant rue du Mont-Blanc n° 58, section du Mont-Blanc de Paris, en exercice depuis le 13 juillet 1789, ayant passé par tous les grades dans la Garde nationale, et venant d’être renommé commandant en second. Il a été commissaire en 1792, pour demander la déchéance du tyran, et membre de la municipalité du 10 août, il est électeur de 1792, et membre du comité de la section du Mont-Blanc.

 

  • Jean Vernier, ancien militaire, ayant 14 ans de service dans les dragons, dont 11 en qualité de maréchal des logis, plus neuf dans les voitures aux environs de Paris, bureau du Pas-de-la-Mule, chargé de la partie des constructions des voitures, des chevaux et des fourrages, âgé de 51 ans, demeurant rue du Pas-de-la-Mule, n° 5.

 

  • Brincourt, de Sedan, âgé de 50 ans, ancien directeur de l’hôpital militaire, membre de la société populaire de Sedan, père de 4 enfants, tous au service de la Patrie.

 

  • Noël, de Sainte-Menehould, département de la Marne, huissier âgé d’environ 40 ans, marié père de quatre enfants, bon patriote, demeurant à Saint-Denis, rue de la boulangerie.

 

  • Vincent-Matthieu Ducoudray, natif de Trimouille, district de Montmorillon, département de la Vienne, père de famille âgé de 37 ans, actuellement hôtel de Berry, rue de la Harpe. Il a donné des preuves du plus pur civisme, depuis le commencement de la Révolution. Il a fourni des notes importantes sur les abus de l’administration.

 

  • Vauthier, capitaine général des douanes au département des Hautes-Pyrénées, père de cinq enfants, excellent patriote, ayant servi 8 à 9 ans, de Pierrefitte, district du Gave.


Liste des suppléants :

 

1 François-Laurent-Sylvestre Hébert, du département de l’Orne, marié, âgé de 34 ans, inspecteur des charrois militaires.

 

2 Richard, adjudant des charrois à Chantilly, âgé de 45 ans, père de sept enfants.

 

3 Casimir Edeline, de Cambrai, à présent à Paris, hôtel de Bordeaux, rue de Chartres, fondateur de plusieurs sociétés populaires dans le pays liégeois, âgé de 41 ans, père de famille, sa femme et ses enfants sont au pouvoir de l’ennemi.

 

4 Gueignard, ancien commis de la trésorerie, du district d’Arcis-sur-Aube, département de l’Aube, père de famille âgé d’environ 33 ans, remplissant actuellement les fonctions de secrétaire du district d’Arcis, patriote intelligent, et digne sous tous les rapports de remplir cette place.

 

5 Guillmot, greffier de la municipalité d’Ormes, district d’Arcis, département de l’Aube, père de famille âgé de 30 à 32 ans.

 

6 Adrien Hébert, natif de Honfleur, département du Calvados, ancien capitaine de navire, depuis secrétaire de la commission des hôpitaux de Paris, actuellement à Rochefort, pour aller aux Isles-du-Vent essayer de recueillir les débris de sa fortune, et de réparer les pertes immenses qu’il a faites dans la Révolution, âgé de 37 ans, marié et père de quatre enfants.

Relevé de Frédéric Pradal, Archives départementales de l’Isère, L417 lettres du bureau militaire aux agents et officiers du département du 1er mars 1793 au 29 nivôse An 4 :

 « Levée des 300 000 hommes de mars 1793, suite au décret du 21 au 25 février de la Convention Nationale :

 

N° 35- Aux 4 districts et aux commissaires du département. Du 17 mars 1793 :


Je joins ici, Citoyen, copie de la lettre que nous a écrite le commissaire ordonnateur provisoire de la 7e division militaire pour nous informer que les muletiers attachés à l’armée des Alpes ayant contracté des engagements pour la campagne doivent être exemptés de marcher à la défense de la patrie, mais que les muletiers qui ont été admis depuis la loi du 24 février dernier doivent être mis au rang de ceux qui peuvent être appelés à servir dans les armées de la République, vous voudrez bien, Citoyen, donner cet avis aux municipalités de Chartreuse du Monestier de Clermont, du Valbonnais, et de Mens où les mulets de l’armée sont cantonnés
».

Portraits :

 

Thomas Dumoulin, né vers 1774, à Saint-Laurent-sur-Saône dans l’Ain, fils de François Dumoulin et de Louise Brunet. Il était domestique chez le citoyen Robert Moton aubergiste et natif « de Mont Bled », district de Mâcon, département de la Saône-et-Loire. Le 4 mars 1793, il était présent sur une liste d’hommes pouvant partir aux armées. Engagé volontaire (13 mars) dans les charrois militaires « auprès d’André Esprit, brigadier dans la conduite des muletiers et mulets de l’armée des Alpes, et cantonné à Pont-de-Veyle ». Désigné pour la levée des 300 000 hommes (14 mars), la municipalité s’inquiéta de son sort (29 mars) alors qu’elle avait réuni les garçons pour procéder aux remplacements des réformés et des absents. Le 2 avril 1793, alors qu’il n’était pas parti, François Dubief promet de lui remettre son uniforme de garde national. Son engagement ne semble pas être valide, puisqu’il passa tardivement la visite médicale au district de Pont-de-Vaux, en date du 6 mai 1793. Taille de 5 pieds, 2 pouces et 9 lignes, les cheveux et sourcils châtains, les yeux bleus, le nez gros, la bouche grande, le menton long et rond[2].

Jean Merle, charretier d’artillerie à l’armée (de l’Ouest), natif de Retombat dans le district d’Agen. Il mourut à l’hôpital des Sables d’Olonnes, Vendée, 24 vendémiaire An III,

 

Louis-Charles Prévost, originaire de Paris, engagé à 21 ans dans le 4ème bataillon de Paris (3 septembre 1792). Passé dans les charrois (1er mai 1793), commissaire des saisies réelles et consignations en Belgique (1798), sous-inspecteur des Eaux et Forêts (1800), inspecteur (1801), secrétaire de la sous-préfecture du Mans (1813), garde de la porte du roi (1814), commissaire de Police à la Rochelle (1816), puis à Montpellier de 1817 à 1821[3].

Taupin, enrôlé au 6ème bataillon de Paris dit de Bonconseil, élu caporal (21 septembre 1792), fourrier (6 décembre), mis en réquisition pour l’agence des charrois militaires le 21 juillet 1794[4].

Article de Jérôme Croyet, Frédéric Pradal et Laurent B.

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[1] Journal Militaire de 1792.

[2] Laurent Brayard, Mémoire de Master II, Annexe III du Dictionnaire des levées d’hommes du district de Pont-de-Vaux, 1791-1795.

[3] Chassin et Hennet, Les volontaires nationaux pendant la Révolution, p. 480, tome 1.

[4] Chassin et Hennet, Les volontaires nationaux pendant la Révolution, p. 607, tome 1.